Coup d’œil sur le magasin du futur

A l’ère du commerce en ligne, il est normal que les magasins explorent d’autres voies. Nombreux sont ceux qui ont déjà leur e-shop, pour de très bonnes raisons et dans un esprit de continuité. Les deux canaux – physique et online – doivent se compléter. C’est pourquoi, en boutique, on se concentre de plus en plus sur l’expérience et la convivialité. Nous avons rencontré des experts qui nous parlent vente en ligne, vitrines, décors, couleurs et même parfums.

1. EC De Schepper

Online & offline, main dans la main – EC De Schepper

Online & offline, la frontière entre ces deux univers tend à s’estomper, et ce dans tous les aspects de notre vie. « L’e-shop doit être un prolongement du magasin physique, et inversement », estime Björn De Schepper (EC De Schepper), leader en Belgique sur le segment de la décoration de bijouteries. « Il est important de refléter le style et l’identité de la boutique jusque dans les moindres détails, y compris sur Instagram et Facebook. L’ensemble doit être cohérent. »

« Ce n’est pas un hasard si quelques géants du commerce en ligne ont décidé récemment d’ouvrir des lieux de vente physiques. Les boutiques concrètes gardent toute leur raison d’être dans notre société. Mais il faut faire attention à l’image de marque, car l’entreprise doit être une marque. C’est pourquoi nous créons du mobilier qui reprend le logo du magasin : cela permet d’être beaucoup plus reconnaissable aux yeux du consommateur. »

L’expérience au centre

EC De Schepper peut se prévaloir de 58 années d’expérience dans son domaine. En plus de la section design avec ses architectes d’intérieur, la société a aussi sa propre unité de production. « Grâce à cette expertise, nous connaissons le produit à fond. Cela nous permet de proposer l’environnement d’achat idéal, adapté à la ‘niche’ dans laquelle le détaillant s’est spécialisé : bijoux fantaisie, moyen de gamme ou premium. » L’uniformité est à fuir. « L’avenir est à l’expérience d’achat, à l’accueil et à la convivialité. Par exemple, grâce à un coin lounge, café ou bar… Tout l’art consiste à accueillir le client de manière aussi chaleureuse que possible. »

« D’où le succès de la tendance botanique : rien de tel pour créer une ambiance ‘comme chez soi’. Les plantes vertes apaisent. Idem en ce qui concerne le style scandinave, désormais omniprésent. Ce n’est pas un hasard. L’époque où le client se cognait littéralement au comptoir en entrant – et s’entendait accueillir par un sonore : ‘En quoi puis-je vous aider ?’ – est bien révolue », confirme Björn. Pour lui, « le magasin de demain ressemblera plus à show-room, avec un comptoir-caisse discrètement installé dans le fond. Il faut que l’étalage soit parfaitement pensé et éclairé. L’ensemble doit respecter un fil rouge : de la boutique à l’e-shop, en passant par les réseaux sociaux ».

2. Scents

Titiller tous les sens – Scents

Une identité olfactive participe de cette reconnaissance comme fil rouge. Tel est le core business de Scents. « Le marketing olfactif contribue d’une part à la création d’une identité en tant que magasin et, d’autre part, à l’expérience client. Si vous voulez vous distinguer de la concurrence, misez sur des parfums qui traduisent des émotions », conseille Patrick Castelain, chez Scents. « Jouer sur le complémentarité des sens permet de les renforcer. Prenons l’exemple très simple d’un mur vert… En le voyant, vous vous attendez à une odeur fraîche de pomme verte ou de lavande, alors qu’en présence d’un mur rouge, vous penserez plutôt à un parfum d’orange, de cerise ou de mandarine. Parmi nos cinq sens, l’odorat est le seul qui agisse directement sur les émotions. »

« Faites en sorte que dans votre bijouterie, les émotions jouent un rôle important dans l’acte d’achat. La perception de la qualité est également primordiale. Dans une bijouterie, il ne faut pas hésiter à signer l’ambiance olfactive à l’aide d’un parfum. Une fragrance sophistiquée augmentera la perception de la qualité et le client aura tendance à accorder moins d’importance au prix. »

Image de marque

Le parfum est cependant quelque chose d’éminemment personnel. Ne court-on pas le risque de perdre des clients au passage ? « Il faut surtout que le parfum soit subtil. Il doit être perçu entre le conscient et l’inconscient. L’idée n’est certainement pas d’agresser les narines des gens dès qu’ils entrent dans le magasin. Il faut savoir que quand on construit une marque, on perd toujours des gens. C’est le cas quand on est amené à trancher des questions stratégiques liées au marketing, du logo au style de communication, en passant par la déco intérieure. Mais pour atteindre votre groupe cible ultime, qui reste le cœur de la question, il faut parvenir à rendre votre marque reconnaissable entre toutes. »

Ce qui nous ramène à l’image de marque. Le magasin du futur, ‘physique’ comme en ligne, est celui où le client se sentira comme chez lui, celui qui sera à la fois personnel et convivial, et qui saura titiller tous les sens.

3. Juwelier Vanquaethem

Une boutique comme un salon – Juwelier Vanquaethem

Offrir de la valeur ajoutée via l’ambiance et le service est ce qu’ils font de mieux à la bijouterie Vanquaethem. Voici neuf mois, la boutique d’Oostkamp a été entièrement rénovée. Le résultat est un vrai petit bijou. Un espace qui a le charme d’un salon. « C’est en réaction à la digitalisation galopante », explique-t-on chez Vanquaethem. « Pendant deux ans nous avons réfléchi au concept du magasin : de quoi avions-nous envie ? Au début, nous avons regardé ce qui se faisait chez des collègues, mais nous restions sur notre faim. Nous sommes même allés jusqu’à Stockholm, Barcelone et Londres pour chercher l’inspiration. Finalement, nous avons créé la nouvelle boutique avec les architectes d’Openplan (www.openplan.be). »

Et ils s’en félicitent. « L’espace a le charme d’un salon. Il y a un grand linéaire de rangement avec un téléviseur, un coin café, des livres et des photos de nous. Quand les clients les voient, cela facilite la conversation. Et c’est beaucoup plus agréable pour eux. On a ajouté deux fauteuils et, bientôt, quand la crise du Covid sera passée, on y déposera le journal. Si quelqu’un doit patienter, il pourra le feuilleter. »

Vendre du sentiment

Les clients ont-ils tendance à rester plus longtemps ? La réponse fuse : « Absolument. Ceux qui entrent nous complimentent sur la boutique. Certains clients, qui viennent pour un petit achat, restent parfois une heure. En ce moment, avec le Covid, les gens nous sont reconnaissants de pouvoir bavarder un peu. Même si tout le monde n’en a pas forcément envie… et nous respectons cela. »

Et voilà comment une bijouterie peut apporter une valeur ajoutée qu’un e-shop impersonnel ne sera jamais capable d’égaler. Les magasins ‘physiques’ gardent incontestablement leur importance. « Nous ne sommes pas situés en centre-ville. Ceux qui viennent chez nous ont fait l’effort de se déplacer. Nous vendons aussi du sentiment. Imaginons une mamy qui souhaite faire un cadeau à sa petite-fille pour sa communion : elle ne le fera sans doute pas en ligne. Elles préféreront pouvoir partager ce moment à deux. »
Cela dit, Vanquaethem propose également un e-shop. « C’est même LA vitrine de notre magasin. Les clients aiment pouvoir vérifier en ligne notre offre, avant de se déplacer jusqu’à la boutique. »

4. WSB design.com

« N’en dévoilez pas trop » – WSB Design.com

« Il s’agit de combiner différents aspects comme la déco intérieure, l’éclairage, le lieu et les collections », recommande Rick Schreuder (WSB Design.Com). « Pour les détaillants installés à deux pas du centre-ville, la vitrine est indispensable pour inciter les clients à pousser la porte. Là où on optait avant pour un vaste étalage, fermé et débordant de produits, on préfère aujourd’hui l’option de la sélection maligne. Donnez des indices et titillez l’intérêt des passants, mais ne dévoilez pas tout d’un coup. »

« Une autre tendance consiste à penser la vitrine en transparence, pour dévoiler l’intérieur du magasin. Cela incite à pousser plus facilement la porte… même si ce n’est pas une science exacte », précise Rick. « Il n’y a pas qu’une ‘recette’ en matière de vitrines, loin de là ! Tout dépend du bâtiment et de l’endroit où vous êtes situé. En dehors des centres-villes, où les clients font l’effort de venir en voiture, la vitrine joue un rôle nettement moins important. »

Osez faire la différence

Attirer le client est une chose. Une fois entré dans la boutique, celui-ci doit avoir envie de s’y attarder. « Les tendances vont et viennent », poursuit Rick. « C’est pour cela que, chez WSB Design.com, nous nous efforçons de développer une base intemporelle. Cela ne veut pas dire que le décor doit être sobre ou neutre. Une touche colorée sur un mur, facile à modifier avec un coup de peinture ou du papier peint, ou un visuel que vous pourrez changer en fonction de l’atmosphère voulue ou d’une collection forte sont des éléments intéressants. On parvient ainsi à mettre en valeur la collection grâce au décor ambiant. »
« Pourtant, en décoration d’intérieur il y a une tendance à laquelle aucun détaillant ne pourra échapper », assure-t-il. « C’est la personnalisation. Osez faire la différence ! Il est important que vous partiez des besoins de votre client et que vous y répondiez. »
Cela se traduit aussi, naturellement, par une expérience intérieure. « Les gens prennent le temps de faire le tour d’un magasin », explique Rick. « Comme au restaurant : on n’y va pas que pour manger. On y va aussi pour l’ambiance, la convivialité et le service. C’est pareil en boutique. Vous devez offrir une valeur ajoutée. Et le meilleur endroit pour le faire, c’est là où le numérique montre ses limites. »