Vos droits en cas de résiliation unilatérale d’une marque

Les effets n’en sont peut-être pas encore clairement visibles pour tout le monde, mais on assiste en ce moment à un véritable chamboulement au sein des réseaux de distribution. Certains acteurs sont déjà allés très loin, d’autres sont en phase d’expérimentation et d’autres encore attendent de voir. Mais la tendance est là : désormais, les marques ne craignent plus de vendre en direct au consommateur.

Le boom de la vente en ligne touche également le monde des bijoux et de l’horlogerie. Nombre de marques veillent non seulement à s’offrir en guise de vitrine un site internet léché, mais aussi à vendre en ligne directement aux particuliers. Les prix ont beau être les mêmes que ceux pratiqués dans les points de vente spécialisés, les marques s’y retrouvent largement, puisqu’elles récupèrent les marges du réseau de distribution. Cette possibilité de vendre leurs produits en ligne offre, en outre, aux marques un outil d’évaluation bien pratique qui les aide à régler le curseur de leurs ventes en magasins : les achats en ligne ont le vent en poupe ? Les marques en profitent pour réduire le nombre de leurs points de vente physiques. C’est ainsi que le réseau de distributeurs perd petit à petit de son importance. Cela incite les fournisseurs à réduire progressivement leur soutien aux boutiques pour investir toujours plus dans la vente directe. “C’est un phénomène typique de notre époque du tout-numérique”, analyse Me Laurent du Jardin, avocat au sein du cabinet Janson et professeur à l’Université catholique de Louvain.

SEULS RESTENT LES MEILLEURS

Les points de vente qui ont la chance de subsister après la restructuration d’un réseau de distribution doivent inciter le consommateur à se déplacer et venir acheter chez eux. “L’expérience de vente prend toute son importance,” poursuit Me Laurent du Jardin. “Les marques ne vont garder comme ambassadeurs que les meilleurs.”

Optimiser les réseaux de distribution doit permettre d’augmenter le chiffre d’affaires de chaque point de vente physique. Le rayonnement des plus réputés d’entre eux fonctionne en quelque sorte comme une “pollinisation croisée” pour augmenter la vente directe via les canaux en ligne. “Aujourd’hui, on ne signe plus de contrats à vie,” insiste Me Laurent du Jardin. “Les contrats entre fournisseurs et revendeurs spécialisés ont une échéance précise qui doit être inscrite noir sur blanc. Ce sont des contrats que l’on peut renouveler sur base de critères prédéfinis ou renouvelables automatiquement, pour autant que les clauses d’une éventuelle résiliation soient décrites en détail.”

PROTECTION LEGALE

“La résiliation d’un contrat de distribution à durée indéterminée est toujours possible, encore faut-il que ce soit dans le respect de la loi et du contrat,” explique Me Laurent du Jardin. Depuis 1961, la Belgique dispose d’une loi spécifique protégeant les concessionnaires de vente. Elle prévoit notamment une indemnisation pour le concessionnaire qui a apporté à son concédant une plus-value notable de clientèle.

Mais si cette loi du 27 juillet 1961 relative à la résiliation unilatérale des concessions de vente exclusive à durée indéterminée semble efficace sur papier, c’est hélas moins vrai dans la réalité. “Comme nous l’avons dit, il s’agit d’une loi spécifiquement belge, or les marques essaient en général de la contourner en soumettant leur contrat à un droit étranger,” souligne Me Laurent du Jardin. L’indemnisation peut parfois aller jusqu’à 12 mois de marge brute calculée sur la moyenne des 3 à 5 dernières années. On comprend la volonté des fournisseurs d’y échapper en écartant le droit belge, alors même que tous les effets du contrat sont produits en Belgique. Souvent, il n’y aura pas la marge pour négocier. La situation paraîtra certainement injuste lorsque le droit belge était effectivement applicable par le passé et que c’est en cours de route que les règles ont changé.

Notre conseil : faites soigneusement relire et vérifier par un avocat le moindre document avant de le signer. Vous éviterez ainsi d’accepter à votre insu des contrats aux clauses douteuses.

plus d’informations: l.dujardin@janson.be